Intervention de Martine Berthet sur le thème « Industrie et Compétitivité » à l’occasion de l’accueil de la délégation du groupe d’amitié Allemagne-France du Bundesrat au Sénat, du mardi 29 au jeudi 31 octobre 2024.

30/10/2024 – « Industrie et Compétitivité » – GIA France-Allemagne.

« Madame la ministre, présidente du G.A, mesdames messieurs les parlementaires allemands et français du G.A, chers collègues,

Nous avons fait le choix du thème Industrie et Compétitivité pour ce deuxième échange et j’ai l’honneur d’intervenir aujourd’hui en binôme avec ma collègue Audrey Linkenheld pour lancer le débat.

Industrie car la crise sanitaire a révélé la carence française et l’abandon au fil des années de notre tissu industriel au profit des entreprises de service ; compétitivité pour notre pays mais aussi pour l’Europe qui se confronte à présent aux grands blocs asiatique, américain mais aussi indien.

En France plusieurs éléments sont à la source tout à la fois du déficit et du manque de compétitivité de notre secteur industriel, mais j’aimerais relever ce matin plus particulièrement le manque d’agilité dans la transmission des PME et ETI patrimoniales, qui a entraîné au fil du temps une évasion de nombre de leurs savoir-faire, ainsi que leur difficulté à trouver les compétences dont elles ont besoin pour leur développement.

L’Allemagne a depuis longtemps fait preuve de réussite sur ces deux points, aussi cherchons nous à nous inspirer de votre modèle. La culture de la transmission familiale est considérée comme un atout stratégique dans votre pays et 50% des jeunes sont dirigés vers des parcours techniques dès l’âge de 11 ans, contre 20% seulement en France. En Allemagne, l’ancrage local et la proximité entre le système éducatif et les entreprises assurent une parfaite continuité entre les compétences acquises et les besoins industriels. En France, en revanche, nos entreprises peinent à attirer des apprentis, en raison d’un manque de cursus adaptés, d’une visibilité limitée sur le marché de l’emploi et d’une offre de logement insuffisante pour les étudiants. Pouvez-vous nous expliquer quels leviers dans vos politiques publiques vous avez actionné pour préserver les savoir-faire patrimoniaux et garantir l’indépendance des entreprises et quelles sont vos orientations actuelles sur ces deux points ?

Par ailleurs, nous avons déployé différents programmes dans France 2030 ou Territoires d’industrie pour accompagner la relocalisation et aider nos industriels à relever les défis auxquels ils sont confrontés, dont l’attractivité des métiers et les compétences que je citais à l’instant, mais aussi la décarbonation de leurs productions. Cependant concernant la compétitivité, les enjeux se situent au-delà, au niveau de l’Europe, particulièrement dans les domaines de la chimie ou de l’automobile, fortement touchés par une concurrence internationale déloyale, notamment de la Chine et des Etats-Unis. Il s’avère nécessaire de recourir aux lois anti-dumping, c’est une attente de nos industriels.

Dans son rapport, de septembre dernier, M. Mario Draghi recommande d’utiliser les nouveaux instruments de défense commerciale de l’Europe, avec des mesures ciblées par secteur, au cas par cas, tels droits anti-dumping, clause de sauvegarde, droits compensateurs, tout en favorisant la réindustrialisation comme meilleur rempart contre les ingérences étrangères. Pensez-vous que ces actions permettront de protéger efficacement nos industries touchées les plus durement par la surproduction chinoise ?

Par ailleurs, les prochaines élections américaines pourraient fortement impacter notre industrie. Rappelons que, tout au long de sa campagne, le candidat Donald Trump a clairement exprimé son intention d’imposer des droits de douane généralisés, de l’ordre de 10 à 20 %, tant à ses amis qu’à ses ennemis, s’il était élu. En 2018, l’Union européenne avait déjà été surprise par les droits de douane américains sur l’acier et l’aluminium européens. Cette fois-ci, l’Europe affirme être mieux armée pour réagir. Selon vous, l’Europe pourra-t-elle réellement faire face à cette nouvelle pression américaine ?

Je vous remercie. »