Martine Berthet cosigne une tribune concernant le Lyon-Turin.

TRIBUNE parue dans le Dauphiné-Libéré et La Maurienne.

« Nouvelle ligne ferroviaire LYON-TURIN : Un projet essentiel pour l’économie, l’écologie et le développement social. Une opportunité pour la Savoie, pour Auvergne-Rhône-Alpes, pour la France et l’Europe ».

184 premiers signataires élus et anciens élus savoyards de toutes sensibilités politiques, représentants de syndicats et d’usagers s’engagent.

Depuis quelques semaines, nous assistons à une instrumentalisation politique par quelques élus extérieurs à notre département, au sujet du chantier du Lyon-Turin. Leur but est de remettre en cause la bonne exécution de cette infrastructure et de générer abusivement des craintes dans la population.

Au regard des responsabilités que nous exerçons ou avons exercées auprès des habitants de la Savoie, en tant qu’élus du territoire représentant les Savoyards, ou membres de la société civile agissant au nom de l’intérêt collectif, nous souhaitons souligner l’importance de cet ouvrage et lui réaffirmer notre soutien.

Le chantier du Lyon-Turin, dont le tunnel de 57 km reliant sous les Alpes la France à l’Italie, est largement engagé et monte en puissance, avec déjà présents 1420 salariés travaillant directement aujourd’hui à sa construction. Cette future liaison ferroviaire est stratégique pour l’ensemble du massif alpin, et pour les générations futures que nous souhaitons voir vivre durablement encore dans nos vallées dans de bonnes conditions écologiques et environnementales.

La réponse adaptée pour le désencombrement de nos routes chargées et pour lutter contre la pollution de nos vallées.

Le réseau ferroviaire est aujourd’hui la seule alternative crédible pour atteindre une mobilité décarbonée, qui doit se traduire par un report massif des flux de marchandises de la route vers le rail, et pour les voyageurs, par une offre de transport public largement concurrentielle à la route ou l’aérien.

Pourquoi choisir le train : 1 tonne de marchandises transportée par train, c’est 14 fois moins d’émissions de CO2, et 6 fois moins d’énergie consommée que par la route.

Plusieurs expertises récentes soulignent l’impact de la pollution des particules fines sur la santé de la population : les vallées alpines sont particulièrement ciblées. Or l’origine de cette pollution vient, dans le domaine des transports, à la fois des résidus de combustion et de l’usure des pneus et des freins. L’exposition à certains polluants tel que le dioxyde d’azote est très directement associée au trafic sur les axes routiers. Les chiffres publics sur une mortalité anticipée du fait de la pollution atmosphérique, et l’évaluation économique des dégâts engendrés par cette seule nuisance sont effarants et démontrent à eux seuls, s’il le fallait, l’urgence de trouver des solutions et donc de développer le ferroviaire.

En quelques décennies, la France a pris un retard gigantesque sur le fret ferroviaire par rapport à ses voisins européens : 9% en France, 18% en Allemagne et en Italie, et 35% en Suisse et en Autriche.

En France, ce sont 93 % de marchandises qui transitent en camions sur les différents franchissements routiers alpins : soit 43 millions de tonnes et 3 millions de poids-lourds chaque année dans les Alpes, principalement par les trois passages de Nice, du tunnel du Fréjus en Savoie et du tunnel du Mont-Blanc. Et la tendance est lourde : depuis 2014, le tunnel du Fréjus a vu son trafic de poids-lourds augmenter de + 25 %, alors que le transport par rail stagne à des volumes historiquement bas, scénario qu’il faut pouvoir évidemment renverser radicalement dans la promotion d’une mobilité bas-carbone.

Dans ce domaine, l’exemple suisse est très instructif : la Nouvelle Ligne Ferroviaire à travers les Alpes en Suisse (NLFA), comprenant trois grands tunnels ferroviaires équivalents au Lyon-Turin, votée par référendum par nos voisins helvètes, permet aujourd’hui à 70% des marchandises entre la Suisse (depuis l’Allemagne) et l’Italie de circuler par le train … contre 8% seulement entre la France et l’Italie (tout le reste étant transporté par camions à travers nos territoires) !

Le Lyon-Turin est donc plus qu’indispensable, car il s’agit du seul moyen efficace de réduire durablement l’impact des nuisances provoquées par le transport international routier dans nos vallées alpines et nos agglomérations. Si la ligne historique qui date du 19ème siècle peut absorber un accroissement limité du fret, elle n’est absolument pas en capacité d’absorber un report massif de marchandises de la route vers le rail, tant pour des questions techniques que de sécurité, tout en assurant aussi évidemment un transport de voyageurs de qualité. Seule une infrastructure nouvelle, performante, moderne et sûre, permettra un report modal massif.

L’opposition au Lyon-Turin est donc un non-sens écologique et politique majeur : elle condamne immanquablement les Savoyards à subir toujours plus de poids-lourds et de pollution. Nous protégeons les Savoyards, nous voulons protéger les générations futures. C’est pour eux que nous nous battons.

Une opportunité pour la Savoie
Le « Lyon-Turin » est un projet qui dépasse le percement d’un simple tunnel.
Localement, la procédure Grand Chantier permet d’accompagner le territoire dans ses investissements afin que le chantier constitue une opportunité pour notre département (travaux contre les crues, enfouissement des réseaux électriques, investissements publics divers, modernisation du parc de logements publics et privés, etc.).

Le Lyon-Turin placera la Maurienne, la Savoie et la région toute entière au coeur d’échanges internationaux, avec tous les apports économiques et sociaux que cela peut engendrer pour le territoire, en n’étant plus un couloir à camions.

Une nécessité pour l’Europe
Le Lyon-Turin est un chantier dont la dimension dépasse largement les frontières de la Savoie. Conçu depuis plus de 30 ans en lien étroit avec nos voisins italiens, et avec le soutien de l’Union européenne, il s’agit de la seule infrastucture permettant une liaison Est-Ouest pour le sud de l’Europe avec le contournement de Lyon dans le cadre du Réseau de Transport Européen. Il améliorera aussi la qualité du réseau ferré et du transport ferroviaire dans toute notre région pour les trains du quotidien en offrant plus de régularité et plus de capacités.

Ce projet est qualifié à tort de « pharaonique » par ses opposants. Pour apporter un éclairage, il est intéressant de comparer son coût avec celui supporté par nos voisins suisses pour la réalisation de leurs trois tunnels (NFLA), pour un total de 23 milliards d’euros, soit 2700€ en moyenne par habitant puisque la Suisse en a assumé seule la charge. Pour la réalisation du Lyon-Turin la France bénéficie d’un financement de 50% de l’Union européenne aussi bien pour le tunnel de base (dont le coût restant
est réparti entre la France et l’Italie), que pour les accès. Au total, pour un coût global sur la totalité de l’infrastructure de 18 milliards d’euros, le montant à la charge de la France, en retenant l’option la plus ambitieuse pour les accès, est d’environ 5 milliards d’euros, soit 75 euros/par habitant ! A titre de comparaison la ligne à grande vitesse entre Paris et Bordeaux inaugurée en 2017 était de 7,7 milliards d’euros et celle prévue entre Bordeaux et Toulouse est de 10 milliards…sans que ces projets n’aient été qualifiés de « pharaoniques ». Oui, nous considérons que les projets ferroviaires modernes et performants constituent la solution de mobilité la plus durable, et la meilleure alternative à l’avion, à la voiture et au camion sur l’ensemble du territoire.

Non à la désinformation
Depuis plusieurs années, des travaux ont lieu en Maurienne. Comme tout chantier, celui du Lyon-Turin occasionne des nuisances importantes. Les Savoyards, dans l’histoire de notre pays, ont toujours démontré leur capacité d’adaptation et d’accueil de ces chantiers d’intérêt général, comme ce fût le cas par exemple pour les barrages et centrales hydrauliques qui fournissent la plus grande part d’énergie renouvelable à notre pays.

Les contraintes d’un chantier de grande ampleur ne doivent être l’occasion d’une désinformation jouant sur les peurs.
Agiter aujourd’hui le spectre d’une pénurie future d’eau du fait du Lyon-Turin n’est ni raisonnable ni responsable. Cette ressource fait l’objet d’un suivi régulier : des tierces expertises réellement qualifiées veillent à la qualité des contrôles effectués et la fiabilité des résultats. Un travail de concertation est engagé sur ce sujet avec les élus du territoire, les services de l’Etat et TELT, comme il peut d’ailleurs s’effectuer sur toutes les questions liées aux impacts environnementaux et nuisances relatives aux chantiers, avec un niveau d’exigence très élevé de la part des élus qui représentent les intérêts de la population locale actuelle et à venir.

La vigilance des acteurs du territoire est aigüe afin que le chantier puisse se poursuivre avec sérieux, rigueur et sérénité : il s’agit d’oeuvrer en toute connaissance des éventuels effets et nuisances pour les supprimer, les réduire ou les compenser. Cela s’effectue à travers des échanges réguliers et une concertation continue menée avec les personnes qui ont la charge de réaliser ces travaux. Les élus du territoire accordent une vigilance accrue à ce point de l’eau.

Par nos différents mandats, notre rôle est de toujours défendre les intérêts des habitants de notre territoire, et d’avoir un très haut niveau d’exigence vis-à-vis du maître d’ouvrage binational, TELT, afin de réduire au maximum les effets négatifs du chantier sur les riverains, dans une attitude constructive.

Nous appelons toutes les personnes qui se mobilisent sur le sujet du Lyon-Turin, quelles que soient leurs opinions, au respect des engagements internationaux de la France et tout simplement au respect de la démocratie, de la volonté majoritaire exprimée par la population au travers du suffrage universel.
Rappelons que la France est engagée dans ce projet aux côtés de l’Italie et de l’Union européenne, et que cela implique aussi d’en respecter le calendrier de mise en oeuvre. Dans un projet d’une telle ampleur qui s’ancre sur le territoire et se construit avec les habitants, chacun a sa place et doit être dans l’échange et l’écoute.

C’est ainsi par un soutien massif que nous, élus savoyards et forces vives de la société civile, en faveur du Lyon-Turin, portons et continuons de nous engager sur ce projet et pour ce grand chantier déjà commencé en Maurienne.

Notre mobilisation concerne ainsi tout à la fois l’exigence de réussir l’insertion des chantiers et d’aboutir sans plus tarder à la mise en service de cette future ligne ferroviaire, avec sans cesse la préoccupation d’œuvrer pour l’avenir de nos enfants en Savoie.