20/12/2023 – Discussion Générale du projet de loi DADUE ( portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union Européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole).
Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mes chers collègues,
Nous examinons un nouveau projet de loi D’Adaptation au Droit de l’Union Européenne -le troisième en trois ans – dont la diversité des sujets – matière pénale, agriculture, industrie, énergie, économie circulaire, – n’a d’égal que la technicité des mesures proposées.
Je tiens à remercier, à ce titre, les deux co-rapporteurs ainsi que le président de la commission spéciale pour leurs travaux, car la technicité et la diversité que je viens d’évoquer ne sauraient occulter l’importance des enjeux soulevés.
Pour un texte DADUE, la difficulté de l’exercice réside dans l’étroitesse des marges de manœuvre dont disposent les Parlements nationaux, à plus forte raison quand un texte contient autant de demande d’habilitation pour légiférer par ordonnances, habilitations heureusement mieux encadrées suite à nos travaux en commission et aux propositions des rapporteurs. Néanmoins et malgré les réserves que nous pourrions nourrir sur certaines dispositions, l’expérience nous a appris que dans de nombreux domaines, la lutte contre la surtransposition est un enjeu capital.
C’est dans ce contexte que la procédure de législation en commission est utilisée pour 18 articles de ce projet de loi.
Sans revenir sur l’ensemble des points évoqués à l’occasion de nos débats de la semaine dernière, je souhaitais néanmoins vous partager quelques dispositions qui ont particulièrement retenu mon attention.
Dans le domaine énergétique, l’article 1er accompagne le développement des infrastructures de recharge en carburants alternatifs, en modifiant les obligations des exploitants. Sur un sujet qui a déjà fait l’objet de travaux importants au Sénat, la commission spéciale a rendu le dispositif plus adapté aux réalités du terrain, en simplifiant notamment le régime de sanction.
Dans le même domaine, je note, via l’article 18, l’abrogation du mécanisme d’interruptibilité, mécanisme régulièrement utilisé en Savoie par nos industriels et permettant de réduire la consommation d’électricité d’un site, en contrepartie d’une compensation financière. Cette mesure parachève une évolution entamée depuis 2021, visant à prévenir un contentieux européen et semble satisfaisante pour les acteurs institutionnels et économiques.
Enfin, sur le volet agricole, à l’initiative du rapporteur, les travaux de la commission spéciale ont permis d’améliorer le dispositif sécurisant juridiquement les missions exercées par l’établissement de l’élevage relatives à la traçabilité des animaux. Les quatre amendements adoptés permettent de conforter le rôle stratégique de l’ensemble des acteurs de la traçabilité animale et confient explicitement à compter du 1er janvier 2026, les missions de traçabilité des espèces bovine, ovine et caprine aux chambres d’agricultures.
Aujourd’hui, en séance, des dispositions clefs du texte sont encore ouvertes à la discussion.
Je commence avec le principal irritant du texte, mais qui heureusement est une exception : son article 28 prévoyant une réforme de la garde à vue. Pourtant mis en demeure dès 2021 par la Commission européenne, le Gouvernement a préféré, pendant deux années, préparer à huis clos et sans en informer le Parlement, une réforme qui désormais doit être adoptée en urgence. Dans ce contexte je me joins aux critiques dénonçant les conditions d’examen d’une réforme d’une telle ampleur et je me réjouis qu’à l’initiative du rapporteur et du Président de la commission des lois, un amendement, adopté en commission, revienne sur des choix de transposition discutable en réinstaurant la possibilité d’auditionner immédiatement des gardés à vue, conformément aux conditions prévues par le droit européen.
Sur un tout autre sujet, ce texte transpose deux axes essentiels du paquet climat européen, notamment sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Ce dispositif, largement soutenu par le Sénat, connait une avancée, avec la création, via l’article 13 d’un régime de sanction applicable aux importateurs, en cas de non-respect des obligations de déclaration pendant la période transitoire. C’est un vrai signal positif pour les industriels produisant en France et en Europe, qui démontre que notre pays s’engage dans sa transition écologique non pas contre leurs activités, mais en valorisant les efforts réalisés par les bons élèves, en luttant contre le risque de « fuites de carbone ». Dans cette même logique, l’article 15 qui adapte au secteur aérien l’extinction progressive de l’allocation gratuite des quotas carbone « historique », s’accompagne de l’allocation de quotas pour encourager l’utilisation des carburants durables.
Sur le sujet de l’hydrogène, je note que la transposition des modalités de calcul des émissions de dioxyde de carbone permettant de qualifier l’hydrogène de renouvelable ou bas carbone, est une première étape importante notamment pour permettre à cette énergie de bénéficier d’un soutien public, mais que de nombreux défis clefs restent en suspens comme les critères de durabilité.
Enfin, sur une technologie au cœur de notre transition écologique, ce texte transpose dans notre droit national plusieurs dispositions sur la conception des batteries, la prévention et gestion des déchets associés ou encore sur le devoir de diligence pour les opérateurs économiques.
Ainsi, vous l’aurez compris, mes chers collègues, notre groupe approuve ces dispositions tendant à mettre notre droit en conformité avec le droit de l’Union européenne, telles que modifiées et améliorées par le Sénat, dont les apports sont nombreux.