Conséquences de l’article 133 de la loi de finances pour 2025 sur le financement des missions régaliennes dans les aéroports de classe 3.

Question n° 05734 adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics et transmise à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.

Mme Martine Berthet attire l’attention de Mme la ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics a été transmise à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports sur les conséquences de l’article 133 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 concernant le financement des missions régaliennes dans les aéroports de classe 3.

L’article 133 de la loi de finances n°2025-127 du 14 février 2025 introduit, à compter du 1er janvier 2027, une nouvelle disposition applicable aux aéroports de classe 3 (accueillant entre 5 001 et 5 millions de passagers par an). Désormais, à l’issue d’un contrat de délégation de service public (DSP), le déficit lié aux missions régaliennes ne sera plus intégralement pris en charge par l’État via le fonds de péréquation, mais devra être assumé par le nouvel exploitant. Le dispositif de financement des missions régaliennes, fragilisé par la crise sanitaire liée au Covid-19, présente aujourd’hui un déficit structurel. Cette situation conduit certains aéroports à mobiliser leur trésorerie pour compenser les déséquilibres entre dépenses et recettes régaliennes.

À cela s’ajoutent l’impact de l’inflation, le remboursement des avances accordées par l’État durant la crise, ainsi que la réforme introduite par l’article 133 de la loi de finances pour 2025, qui met fin à l’apurement du solde négatif en cas de renouvellement de DSP. Ces évolutions compromettent la soutenabilité économique des aéroports de proximité. Cette modification législative entraîne, de fait, un transfert de charges non compensé de l’État vers les collectivités gestionnaires, qui subissent la dégradation de l’équilibre économique de leurs DSP, induisant à terme plus de participation de leur part à l’investissement voire au fonctionnement des plateformes.

L’exemple de l’aéroport de Chambéry Savoie Mont Blanc est éclairant. Dans le cadre du renouvellement de la DSP prévu en 2029, l’exploitant estime la dette liée aux missions régaliennes à 2,8 millions d’euros fin 2024. À cela s’ajoute une dette prévisionnelle d’environ 7,5 millions d’euros sur la période 2025-2029 (soit 1,5 million d’euros par an à conditions constantes), portant le montant total à reprendre par le futur délégataire à près de 10 millions d’euros. Dans ces conditions, le département pourrait se retrouver en difficulté lors des négociations du prochain contrat de DSP, avec le risque de ne pas trouver de candidat à la reprise de l’exploitation. Si le Gouvernement a indiqué que le futur exploitant pourrait compenser ce déficit via les recettes issues du tarif de sûreté-sécurité (T2S), cette solution ne tient pas pleinement compte de la diversité économique des aéroports de classe 3 dont certains enregistrent une fréquentation proche du seuil d’un million de passagers. Elle limite par ailleurs la capacité des collectivités à définir librement les modalités et l’équilibre de leur DSP.

Dans ce contexte, elle souhaite connaître les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre afin de sécuriser le financement des missions régaliennes dans les aéroports de proximité, tout en protégeant les collectivités gestionnaires d’une aggravation de leur charge financière.

Réponse de M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports

Le Gouvernement est attentif à la situation de l’aéroport de Chambéry-Aix-Les Bains, selon sa dénomination officielle, comme à l’ensemble des aérodromes français qui participent au maillage territorial.

Les exploitants d’aérodromes ou de groupement d’aérodromes bénéficient de recettes fiscales dédiées, en vue du financement de leurs missions de sécurité et sûreté (services de sécurité-incendie-sauvetage, de lutte contre le risque animalier, sûreté ainsi que contrôles environnementaux). Ces recettes fiscales sont issues, d’une part, des recettes assises sur le niveau de trafic au départ de chaque aérodrome concerné issues des Tarifs de sûreté et de sécurité (dite T2S) de la taxe sur le transport aérien de passagers et de la taxe sur le transport aérien de marchandises, et d’autre part, du tarif de péréquation aéroportuaire majoritairement alimenté par les grands aérodromes.

Cette péréquation bénéficie uniquement aux petits aérodromes mais aussi à des aérodromes de taille moyenne dont le bilan financier au titre de la sûreté/sécurité est déficitaire.

Jusqu’alors, en cas de solde négatif des comptes régaliens lors d’un changement d’exploitant aéroportuaire des aérodromes de taille moyenne dits de classe 3, le déficit cumulé constaté était remboursé à partir d’un fonds de réserve pour les fins de concession. Ce fonds de réserve, alimenté par les recettes de péréquation aéroportuaire, contraignait les services de l’État à maintenir un niveau relativement élevé de cette réserve et n’incitait pas les exploitants des aérodromes de classe 3 à maîtriser leurs coûts en matière de sûreté et de sécurité. La loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 prévoit dans son article 133, à compter du 1er janvier 2027, un alignement du régime de solde des comptes régaliens des aérodromes de classe 3 sur les aérodromes de plus grande taille dits de classes 1 et 2 au terme de l’exploitation d’un aérodrome. Désormais, en cas de déficit, ce dernier sera transmis par l’exploitant sortant à l’exploitant entrant et il ne sera plus couvert par le fonds de réserve issu des recettes de péréquation aéroportuaire. Cet article permet d’harmoniser entre aéroports le traitement des fins des délégations de service public sans remettre en cause l’équilibre du système. Ainsi, en cas de déficit en fin d’exploitation, ce déficit devra bien être repris par le nouveau délégataire mais celui-ci pourra néanmoins le couvrir par des recettes issues du T2S.

Toutes les dépenses de sécurité et de sûreté nécessaires resteront éligibles à un financement par le tarif de sûreté et de sécurité, dont la limite supérieure a été relevée à 20 euros par cette même loi de finances, pour les aérodromes de classe 3 dont fait partie l’aérodrome de Chambéry-Aix-les-Bains. La part de recettes de péréquation qui ne sera plus immobilisée pour alimenter le fonds de réserve viendra augmenter le volume de péréquation affecté aux aéroports bénéficiaires et ainsi contribuer annuellement à une meilleure couverture de leurs coûts de sécurité et de sûreté.

Par ailleurs, le Gouvernement réfléchit dans le cadre du prochain projet de loi de finances pour 2026 à des mesures, portant notamment sur la péréquation aéroportuaire, afin de donner des moyens supplémentaires aux aéroports pour faire face au remboursement des avances consenties par l’État dans le cadre de la crise liée à l’épidémie de Covid-19.

Le Gouvernement est conscient à la fois des enjeux de sécurité et de sûreté des aéroports français et des contraintes économiques auxquels ces derniers sont soumis. Dans ce cadre, le Gouvernement veille, notamment dans le cadre des négociations au niveau européen, à ce que les évolutions envisagées offrent des solutions cohérentes avec les différentes typologies d’aéroports. En parallèle, il invite les exploitants d’aérodromes à maîtriser au maximum leurs coûts de sécurité et de sûreté et à mettre en oeuvre les moyens humains et techniques strictement requis par la règlementation en vigueur.