Martine Berthet: M. le Ministre, je souhaite attirer votre attention sur la mention d’origine des produits de la pêche dans les restaurants.
Si la zone de pêche et le pays d’élevage sont toujours précisés dans les poissonneries, tel n’est pas le cas dans les restaurants, alors même que c’est obligatoire pour la viande depuis un décret du 17 décembre 2002. Pour les produits de la pêche, selon l’article L. 412-6 du code de la consommation, qui a été introduit par la loi du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, cette indication est facultative. Alors que la consommation locale a été très largement promue par la loi du 22 août dernier portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est légitime que le consommateur puisse être informé de l’origine des aliments qu’il consomme. Est en jeu également la valorisation de l’activité de nos pêcheurs et poissonniers, qui suivent des traditions ancestrales. Les restaurateurs sont, quant à eux, fiers de pouvoir inscrire à leur carte des produits locaux de qualité. Dans le département de la Savoie, les clients des restaurants doivent pouvoir distinguer, dans les menus qu’on leur propose, les lavarets, les perches et les perchots issus des lacs naturels du Bourget et d’Aiguebelette et ceux qui ont été achetés dans d’autres pays, lesquels doivent alors être vendus à des prix bien inférieurs. Dans la situation actuelle, il existe une véritable distorsion de concurrence, au détriment des professionnels de la pêche et de la poissonnerie. En Europe, plus de 60 % des produits de la mer sont importés. Le 12 mai 2016, une résolution du Parlement européen sur la traçabilité des produits de la pêche et de l’aquaculture dans la restauration et le commerce de détail a été votée. Néanmoins, la Commission n’y a jamais donné suite. Aussi, je souhaite connaître la position du Gouvernement à ce sujet et les dispositions qu’il entend prendre.
Jean-Baptiste Lemoyne, ministre délégué, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie, et des petites et moyennes entreprises.
Madame la sénatrice Berthet, vous avez raison, nous attachons tous la plus grande importance à la question de l’indication de l’origine des aliments, en particulier les consommateurs, qui sont de plus en plus attentifs à la traçabilité des produits. Le bonheur est dans le pré (Sourires.), mais aussi dans la rivière, si je puis dire, et surtout dans les circuits courts ! Certes, comme vous venez de le rappeler, la Commission européenne n’a jusqu’ici pas « embrayé » – vous me pardonnerez cette formule quelque peu triviale. C’est dommage, mais c’est ainsi. Pour autant, nous ne baisserons pas les bras et continuerons de défendre l’idée qu’il serait utile d’étendre la mention d’origine des produits de la pêche dans la restauration, notamment dans le cadre de la prochaine présidence française de l’Union européenne. Je m’engage également à ce que Julien Denormandie, Annick Girardin et moi-même portions cette ambition dans le cadre de la stratégie européenne « De la ferme à la fourchette ». À l’échelle nationale, le Gouvernement a déjà mis en œuvre un certain nombre d’expérimentations et soutenu des projets locaux. Je vous informe par ailleurs que, en 2022, la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) conduira une enquête sur les circuits de commercialisation des poissons des lacs et des rivières. L’ensemble de ces initiatives devrait nous permettre de déterminer si l’extension de la mention d’origine présente un véritable intérêt et de nourrir une réflexion qu’il nous appartiendra de porter au niveau européen, puisque tel est l’échelon idoine pour en débattre. D’ici là, cela ne doit pas nous empêcher de poursuivre le travail engagé avec les associations de maîtres restaurateurs, ou avec Guillaume Gomez, par exemple, l’actuel « ambassadeur de la gastronomie française », de sorte à faire progresser les choses. La proposition que vous nous soumettez est dans l’air du temps ; plus encore, elle me paraît aller dans le sens d’une alimentation plus saine. C’est pourquoi nous en ferons un combat commun.
Martine Berthet.
Je vous remercie, monsieur le Ministre. Nous comptons vraiment sur la présidence française de l’Union européenne pour faire avancer ce dossier si important pour nos restaurateurs et nos pêcheurs.