Statut d’espèce protégée du loup

15e législature

Question écrite n°18533 de Mme Martine Berthet (Savoie – Les Républicains)

Publiée dans le JO Sénat du 29/10/2020 – page 4896

Mme Martine Berthet attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur les conséquences de la présence en grand nombre du loup sur notre territoire national.

La France est signataire de la convention de Berne du 19 septembre 2019 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe et l’a ratifiée le 26 avril 1990. Trente ans après la ratification de la convention de Berne, le loup figure toujours à l’annexe II concernant les espèces de faune strictement protégée. Pourtant, en 2019, le dernier comptage a fait passer la population à 530 individus, au-dessus du seuil de viabilité de l’espèce fixé à 500 loups en 2023 par l’actuel plan national loup. Les ovins sont particulièrement touchés mais les loups s’attaquent également à présent de plus en plus aux bovins et aux équins. À force de n’être plus chassés, ils n’ont plus la crainte de l’homme et se rapprochent des habitations. On constate de fait de plus en plus d’attaques au sein même des villages.

La présence du loup en France est incompatible avec notre tradition de pastoralisme. En Savoie, les éleveurs sont de plus en plus résignés et révoltés. Si rien n’est fait, des conséquences dramatiques pour eux-mêmes ou pour l’entretien des paysages de montagne sont à prévoir. Par ailleurs, cette présence en forte augmentation du loup qui n’est plus chassé est un contresens pour la protection de la biodiversité. Celle-ci est mise en danger à la fois par le surpâturage des animaux en enclos et par la présence des chiens rendue obligatoire. Ces derniers chassent les oiseaux, les marmottes et autre faune sauvage.

Aussi, elle souhaiterait savoir si et dans quel délai le Gouvernement entend demander la révision des annexes de la convention de Berne afin que le statut du loup puisse évoluer en France.

En attente de réponse du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation.

Réponse de M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation 

Publié le : 10/06/2021, page 3678 

Texte de la réponse : Le loup est une espèce « strictement protégée » au titre de la convention de Berne et de la directive européenne « habitats, faune, flore ». En vertu du droit européen [articles 2§2, 3§2 et 4§2 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (UE)], l’environnement est un domaine de compétence partagée entre l’UE et ses États membres. Toutefois, pour les accords internationaux ayant des conséquences sur des règles communes en la matière, la compétence de l’UE devient exclusive. C’est le cas de la convention de Berne. Par conséquent, lors des réunions du comité permanent de la convention de Berne, l’UE s’exprime au nom de ses États membres, en fonction du mandat voté préalablement par le Conseil des ministres de l’UE. Des demandes de déclassement du loup de l’annexe III à l’annexe II de la convention de Berne ont d’ores et déjà été portées par la Suisse, mais à ce jour, elles n’ont pu faire l’objet d’un consensus et il semble exclu d’obtenir, à brève échéance, une révision du statut de protection du loup. D’autre part, les États membres de l’UE sont soumis à la directive 92/43/CEE dite « Habitats, Faune, Flore » dans le cadre de laquelle le loup est également inscrit aux annexes II et IV. Cette directive, comme la convention de Berne, autorise, sans changement de statut de l’espèce, la possibilité de déroger au principe de protection stricte afin de prévenir des dommages importants, en l’absence de solution alternative et à condition de ne pas compromettre l’état de conservation de la population. Des mesures de gestion peuvent donc être mises en œuvre afin de répondre aux difficultés des éleveurs confrontés à la présence du loup. Dans ce cadre, la France assure une gestion adaptative de l’espèce qui tient compte de sa dynamique démographique et de la pression de prédation pour définir le niveau de prélèvement. Pour 2021, comme en 2020, le plafond est fixé à 19 % de l’effectif estimé, en se fondant sur les données du suivi hivernal de la population de loup fournies par l’office français de la biodiversité. La possibilité d’un plafond supplémentaire de 2 % est prévue lorsque le seuil de 19 % est atteint avant la fin de l’année, afin de pouvoir assurer la défense des troupeaux toute l’année. Ce protocole d’intervention s’inscrit dans le cadre du plan national pour le loup et les activités d’élevage 2108/2023 qui vise à concilier un double impératif : d’une part, protéger le loup et, d’autre part, permettre au pastoralisme d’atteindre ses objectifs économiques, garantir l’aménagement des espaces ruraux et le lien social indispensable à la vie des territoires. De nombreuses actions ont été engagées et vont se poursuivre, notamment pour accompagner les éleveurs dans la mise en place des mesures de protection des troupeaux. La mise en œuvre de ce plan s’inscrit dans la durée. Il convient de noter que, pour la troisième année consécutive, malgré l’augmentation de la population de loups et son expansion géographique, la prédation est stabilisée et a même connu pour la première fois une légère baisse en 2020 (11 767 animaux prédatés en 2020, contre 12 451 en 2019, et 12 523 en 2018).